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La Scapigliata

La Scapigliata (« L'Échevelée » ou « L'Ébouriffée ») ou, selon l'orthographe italienne médiévale, La Scapiliata ou Tête de jeune fille, est une peinture sur bois attribuée à Léonard de Vinci ou à l'un de ses élèves, un travail probablement exécuté entre 1506 et 1508 et conservé à la galerie nationale de Parme en Italie.

Ce tableau de petites dimensions est le portrait d'une jeune femme anonyme et présente de fortes oppositions entre un visage achevé et la chevelure et les épaules à peine esquissées.

Par le manque de documents et de témoignages de l'époque de sa création et par la diversité, voire la divergence, de ses caractéristiques techniques et artistiques, la datation de l'œuvre mais aussi l'identification de son éventuel commanditaire, voire son attribution, demeurent très discutées au sein de la communauté scientifique depuis 1896. Sa destination fait aussi l'objet d'un débat entre les chercheurs pour savoir s'il s'agit d'une étude préparatoire, d'un exercice de style à destination personnelle ou d'un retour à l'Antique.

Description L'œuvre est réalisée sur panneau de noyer. De petite taille, elle est à peu près carrée et mesure 24,7 × 21 cm.

Il s'agit d'une peinture inachevée sous la forme d'une grisaille : elle représente une tête, dessinée directement au pinceau avec de la terre d'ombre sur la surface du bois, sans préparation autre qu'une couche de céruse contenant des pigments à base de cuivre, jaune de plomb et d'étain. Le visage bénéficie de rehauts de blanc de céruse. Enfin, l'œuvre est vernie avec de l'ambre jaune viré au vert.

Le tableau représente une tête de jeune femme dont le visage est achevé ; à l'inverse, sa chevelure et la ligne de ses épaules sont à peine esquissées. De fait, quelques lignes suggèrent ces derniers éléments mais, dans le style léonardien, ce sont bien l'ombre et la lumière qui modèlent son visage.

La tête est tournée de trois-quarts vers la gauche et inclinée vers le bas. Ses yeux, qui ne regardent pas le spectateur, sont mi-clos et présentent des paupières légèrement gonflées. Ses lèvres esquissent ce qui pourrait être assimilé à un début de sourire. Par contraste, ses cheveux sont évoqués par des traits marqués, rapides faits au pinceau et s'éparpillent autour de la tête pour tomber en larges boucles sur les épaules.

Attribution Ici encore, il n'existe pas de certitude en la matière. Néanmoins, une très large majorité des spécialistes attribuent la Scapigliata à Léonard de Vinci.

De fait, cette attribution a évolué au cours des siècles. D'abord, considérée de la main du maître à son entrée à la galerie nationale de Parme, en 1839, l'œuvre est attribuée à l'école de Léonard par Corrado Ricci en 1896, Wilhelm Suida en 1929 ou Ottaviano Quintavalle en 1939. Ce n'est qu'avec Stefano Bottari en 1942 et surtout Carlo Pedretti en 1953 qu'elle est réattribuée à Léonard de Vinci.

Pour cela, les spécialistes s'appuient sur des éléments historiographiques pour fonder leur jugement : ils considèrent ainsi qu'il s'agit probablement de l'une des quatorze œuvres mentionnées en 1531 dans le « petit passage devant la petite chambre de la Grotte » du palais ducal de Mantoue (un couloir situé à proximité du studiolo d'Isabelle d'Este et conduisant à la villa de la marquise Marguerite de Montferrat) parmi lesquels s'en trouve un « de Léonard de Vinci ». La peinture est ensuite identifiée avec le tableau représentant une « jeune fille échevelée (italien : donna scapiliata), ébauche, œuvre de Léonard de Vinci » et relevée dans l'inventaire des collections des Gonzague en 1627. Ils s'appuient également sur des éléments stylistiques et notamment sur le fait que la Scapigliata est techniquement et stylistiquement proche de tableaux inachevés du maître, comme L'Adoration des mages ou le Saint Jérôme. À l'inverse, l'aspect novateur et expérimental de l'œuvre tendrait selon eux à infirmer une attribution à un élève ou suiveur de Léonard de Vinci.

Pour autant, cette attribution est rejetée par certains historiens de l'art, et ce, dès sa redécouverte en 1896 et notamment par Corrado Ricci qui voyait dans cette peinture « une imitation ou un faux assez moderne » et qui l'attribue à l'un de ses anciens propriétaires, Gaetano Callani. De même, en 2019, l'historien de l'art Jacques Franck l'attache à un des élèves de Léonard de Vinci, Giovanni Antonio Boltraffio (1467 - 1516). Pour cela, il considère divers éléments propres à rejeter toute attribution au maître : « simplification excessive du contour de la mâchoire inférieure », erreurs dans la « perspective de la bouche » telle qu'elle s'insère dans l'ensemble du visage ou dans la représentation du crâne, « étrangement allongé dans la partie postérieure ». Pour étayer sa nouvelle attribution, il rapproche la Scapigliata avec une Tête de Vierge attribuée avec certitude à Boltraffio et conservée à Chatsworth House. De plus, les dernières études scientifiques conduites par Clelia Alessandrini montrent que la technique d'exécution y diffère de ce que réalise le maître dans ses autres productions. Enfin, autre spécialiste éminent, Frank Zöllner n'évoque pas la Scapigliata dans son catalogue raisonné des œuvres de Léonard.

Quoi qu'il en soit, il semble bien que la Scapigliata soit une œuvre à plusieurs mains : la représentation des cheveux, selon une touche inhabituelle chez le maître, pourrait être ainsi un rajout tardif ; de même, un emploi inhabituel de certaines matières chez Léonard confirmerait la présence d'une seconde main - même si Pietro Marani affirme les avoir trouvées évoquées ou rarement utilisées par le maître.

Titre Le tableau ne porte originellement pas de titre précis, comme c'est le cas pour toute œuvre antérieure au XIXe siècle ; il est alors nommé selon sa description : « testa di una donna scapiliata » (« tête de jeune femme échevelée ») dans l'inventaire des collections des Gonzague en 1627 ou « une tête de Léonard de Vinci représentant une Madone, en clair-obscur », lorsque Francesco Callani en propose l'acquisition à l'Accademia di Belle Arti en 1826.

Cohabitant avec ce titre descriptif, la peinture est depuis la fin du XIXe siècle parallèlement nommée par le seul terme de « Scapiliata ». Depuis, les deux orthographes italiennes « Scapigliata » et son pendant selon l'orthographe italienne médiévale « Scapiliata » sont utilisées dans la littérature scientifique, avec toutefois une certaine préférence pour la première dans les études en anglais et italien et pour la seconde dans les ouvrages en français.

c. 1500-1510
Oil on panel
24.6 x 21.0cm
Q797902
Image et texte reproduite avec la permission - Wikipedia, 2023