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La Nef des fous (Bosch)

La Nef des fous est un tableau du peintre néerlandais Jérôme Bosch (v. 1450-1516). Huile sur panneau de 58 × 32 cm, réalisé vers 1500, il est actuellement exposé au Musée du Louvre, à Paris. Il faisait jadis partie, avec La Mort de l'avare et Allégorie de la débauche et du plaisir, respectivement à la National Gallery of Art (Washington) et à la Yale University Art Gallery (New Haven), du Triptyque du vagabond, dont le panneau central a disparu.

Le Musée du Louvre est entré en possession de La Nef des fous à la suite d'un don de l'un de ses conservateurs, Camille Benoit, en 1918. Le musée possède en outre un dessin préparatoire ayant servi à l'élaboration de l’œuvre.

Le revers du panneau, en grisaille, représente Le Colporteur. Il se raccorde exactement au revers du fragment conservé à Yale. Se répondent ainsi avarice et excès, deux aspects de la même folie pécheresse qui éloigne de Dieu, l'excès étant incarné par une assemblée de gloutons et d'ivrognes voguant à leur perte comme des insensés.

Le thème de la « Nef des fous » est connu dans la littérature contemporaine de Bosch et dans les traditions des Flandres au XVe siècle. On a fait le rapprochement avec Das Narrenschiff ou La Nef des fous de Sébastien Brant, dont la première édition paraît en 1494 à Bâle, et est rapidement traduite dans plusieurs langues, notamment en néerlandais. Une édition de cet ouvrage paraît à Bois-le-Duc vers 1500. L'auteur accueille, dans sa nef symbolique, des fous de toutes catégories et fait défiler les faiblesses humaines. L'une de ses strophes dit : « Mieux vaut rester laïc que de mal se conduire en étant dans les ordres ». Beaucoup de similitudes existent entre ce livre et la représentation faite par Bosch.

De nombreux autres textes rappellent les fêtes des fous en honneur au bas Moyen Âge. Ces textes stigmatisent la folie à Satan. L'atmosphère du temps était à la dérision du comportement du bas clergé. Les carnavals allemands se sont inspirés de ces textes et faisaient défiler des chars représentant la « Nef du Mal » que la foule finalement incendiait.

Bosch est un homme de la fin du Moyen Âge, la Réforme n'est pas très loin. Tant l'Église catholique que les réformateurs veulent freiner les débordements des carnavals ; le pouvoir lui aussi craint pour l'ordre public. On réprime le rire de la foule ou à tout le moins on veut le contrôler. C'est le pouvoir qui bientôt organisera les fêtes. Bosch n'est pas sans doute très éloigné de son contemporain Érasme qui « ne raille pas les individus mais les vices  : le rire est mis au service de la morale ».

Érasme ironise aussi à propos des concitoyens de Bosch. Dans L'Éloge de la folie, il a dit à propos des Brabançons  : « Au lieu que chez les autres hommes l'âge apporte la prudence, plus ceux-ci approchent de la vieillesse, plus ils sont gais ». Et George Minois commente « la folie est utilisée comme un repoussoir  : il s'agit de montrer l'absurdité d'un monde privé de codes et d'interdits, d'un monde qui renie ses valeurs. Ce monde est fou, et l'on en rit, mais d'un rire qui n'est pas joyeux ».

Le lien entre les textes littéraires, tels ceux de Sébastien Brant, et le tableau n'est pas admis par tous les historiens. Cependant, même si Bosch n'en a pas eu connaissance, ces textes et le tableau illustrent bien un même état d'esprit qui est celui du moment. De plus, la métaphore de la barque était l'une des plus fréquentes au Moyen Âge. On la retrouve aussi dans La Barque bleue de Jacques van Oestvoren.

1500-1510
Huile sur bois
58.0 x 33.0cm
RF2218
Image et texte : Wikipédia, 2021

Présenté par

Musée du Louvre
Musée du Louvre
Collection permanente